Sept raisons pour refuser de négocier l’accord de libre-échange UE-USA

13 MAI 2014 | PAR
LES INVITÉS DE
MEDIAPART
Susan
George et Cécile Monnier (Nouvelle Donne) exposent ici
pourquoi le mouvement réclame «
l’abandon pur et simple des négociations autour
du Tafta » : un traité «
façonné par des multinationales », et
qui entend «
privatiser » non seulement la justice mais une part du
travail législatif.
- Parce que son nom,
Tafta ou TTIP, ne dit pas la vérité sur son
contenu. Ce traité concerne peu le commerce, mais davantage
l’investissement, et s’intéresse surtout
aux règlements et normes qui gouvernent toute mise sur le
marché d’un produit ou d’un processus.
- Parce que les tarifs
douaniers que vise à faire tomber le Tafta sont
déjà très bas – de
l’ordre de 2% à 3%, sauf pour
l’agriculture. Si on devait diminuer les barrières
douanières en Europe, ce serait la mort
programmée d’une grande partie des agriculteurs
européens.
- Parce que ce
traité a été conçu et
façonné depuis de longues années par
des multinationales des deux côtés de l’Atlantique,
dont le souci majeur est de réduire et «
d’harmoniser » vers le bas les deux
systèmes. Ces entreprises pensent ainsi
économiser des milliards d’euros, mais cette
économie se fera au prix d’une baisse de la
protection du consommateur, de sa santé, de sa protection
sociale et de l’environnement. Les États-Unis ne
voient aucun inconvénient aux OGM, gaz de schiste, boeuf
nourri aux hormones, poulets rincés au chlore,
médicaments hors de prix. En revanche, ils voient
d’un très mauvais oeil – tout comme les
grands groupes européens – les produits
pharmaceutiques génériques,
l’amélioration de la protection sociale, des
salaires ou encore des retraites, les services publics qui «
devraient » être privatisés, ainsi que
toute restriction de la liberté du marché ou de
la sacro-sainte « concurrence libre et non faussée
».
- Parce que si un
État mettait en place une loi ou toute autre mesure risquant
d’entamer les pro_ts actuels ou même futurs
d’un investisseur étranger, celui-ci pourrait
traduire cet État devant un tribunal d’arbitrage
privé. Ce tribunal pourrait alors décider
d’une compensation en faveur de l’investisseur
(sous d’autres traités bilatéraux
similaires, la plus importante compensation imposée a
été de 1,1 milliard de dollars). Ce sont bien
sûr les contribuables qui paieraient ces amendes, ainsi que
les coûts élevés de justice (avocats et
arbitres spécialisés, pour le moment surtout
américains et britanniques).
- Parce que ce
traité entend privatiser non seulement la justice par le
système de l’arbitrage privé,
injustifié dans des pays où les cours de justice
sont stables et non corrompues, mais aussi une partie des fonctions
législatives qui concernent la régulation des
marchés et les lois qui protègent les citoyens.
Les États seront amenés à bien
réfléchir avant d'adopter de nouvelles lois
protectrices, de crainte d’être assaillis de
procès longs et coûteux.
- Parce que ce
traité est rétroactif et couvrira les
investissements déjà effectués, soit
environ 3 000 milliards de part et d’autre de
l’Atlantique.
- Parce qu'il est
secret et négocié dans un déni de
démocratie total: même les parlementaires
européens n’ont pas le droit de le lire ou de
consulter les compte-rendus des cycles de négociation.
Comment
peut-on accepter qu’un
traité qui mettrait à mal toutes nos normes et
réglementations et qui
soumettrait nos Etats et nos collectivités à la
volonté des multinationales
soit négocié dans le dos des citoyens ? Encore
une fois, Nouvelle Donne demande
l’abandon pur et simple des négociations autour du
TAFTA : sans dramatisation,
mais avec conviction, refusons de nous asseoir à cette
table-là !
Susan
George, membre du comité de soutien de Nouvelle Donne et
présidente d’honneur d’Attac
Cécile
Monnier, candidate dans le sud-ouest aux
élections européennes pour Nouvelle Donne